Les derniers des esclaves africains
Publié le 29 mai 2019. Par La rédaction de Books.

USA with his great granddauughters, Mary Lumbers and Martha Davis
L’épave du Clotilda, dernier navire négrier à avoir fait la traversée entre l’Afrique et les États-Unis, a été retrouvée cette semaine par une équipe de chercheurs américains, dans le fleuve Mobile, dans l’Alabama.
Les autorités américaines ont longtemps nié l’existence de ce bateau et de son ultime voyage réalisé en 1860, plus de cinquante ans après l’abolition de la traite, note l’historienne franco-sénégalaise Sylviane Diouf dans Dreams of Africa in Alabama: The Slave Ship Clotilda and the Story of the Last Africans Brought to America.
L’histoire des esclaves transportés sur le Clotilda a beaucoup intéressé les journalistes, écrivains et historiens dès le tournant du XXe siècle. Il faut dire qu’ils formaient une communauté à part. Ces 110 hommes, femmes et enfants kidnappés sur la côte du Dahomey, dans l’actuel Bénin, sont restés soudés une fois arrivés en Amérique, allant jusqu’à fonder une localité.
À leur arrivée, ils travaillent dans des plantations et des entreprises des environs de Mobile, et ne se fondent pas à la population esclave de la région. Ils restent attachés à l’Afrique et ne rêvent que d’y retourner. Ils se défendent les uns les autres n’hésitant pas à braver les contremaîtres.
À l’abolition de l’esclavage, en 1863, les anciens du Clotilda cherchent à regagner l’Afrique. Ils n’en trouvent pas le moyen et se résolvent à rester en Amérique, mais à leurs conditions. Ils tentent de contraindre leur ancien propriétaire à les dédommager en leur cédant un terrain. Une entreprise risquée quand on sait que le simple fait de répondre à un Blanc pouvait valoir à un Noir de se faire tuer, note Diouf. Ils n’obtiennent rien, mais ne se résignent pas. Ils économisent et mettent leur argent en commun pour acheter un lopin de terre. Ce sera leur ville : Africa Town.
Ils se choisissent un chef et des juges, enterrent les leurs selon les rites traditionnels, apprennent à leurs enfants leurs langues et leurs valeurs. Mais ils se font aussi peu à peu à l’anglais et se convertissent au christianisme. L’église sera l’un des premiers bâtiments construit à Africa Town. L’Afrique cesse d’être pour eux simplement un lieu pour devenir un état d’esprit, note Diouf.
À lire aussi dans Books : Le dernier esclave parle, septembre-octobre 2018.