Laissons dépérir les sites historiques
Publié le 14 septembre 2018. Par La rédaction de Books.
L’un des buts des journées européennes du patrimoine ce week-end est de sensibiliser le public à la préservation des sites historiques.
Mais la conservation, tradition dominante dans la politique patrimoniale occidentale, a des limites, note Caitlin DeSilvey professeur de géographie culturelle à l’université d’Exeter. La préservation des lieux du passé devient de plus en plus compliquée. Le nombre de sites à sauvegarder augmente d’année en année et le coût des opérations de maintenance ou de réhabilitation également. Les décideurs se voient obligés de faire des choix.
Face à ces dilemmes, DeSilvey suggère de laisser dépérir certains sites. « Il y a de la place pour explorer des approches plus créatives dans la manière dont nous prenons soin de notre patrimoine », assure-t-elle. Elle décrit, dans son livre Curated Decay, l’exemple de l’ancien site de test d’armes nucléaires d’Orford Ness dans le Suffolk, dont les bâtiments sont promis à une désagrégation lente. La base militaire secrète en bord de mer est aujourd’hui une réserve naturelle. Le National Trust (l’équivalent britannique des services des monuments historiques) la gère selon une politique de « ruine continue ».
« Le délabrement et la désintégration peuvent être culturellement, aussi bien qu’écologiquement, productifs, souligne DeSilvey, mais nous devons aussi reconnaître que les gens ont des sentiments forts pour ces lieux, des sentiments qui doivent aussi être pris en compte. » Selon elle, en réutilisant les matériaux, en insistant sur un processus vivant et non sur un objet idéal figé dans le temps, la détérioration peut être un instrument pour donner du sens à un lieu, et ce de manière plus forte que la conservation classique.
A lire aussi dans Books : La Russie à l’épreuve de ses ruines, décembre 2012.