Les choses que nous ne verrons jamais

Chaque jour, des millions d’images extrêmement violentes sont postées sur Internet. Une armée de nettoyeurs invisibles a la lourde tâche de les traiter le plus rapidement possible.

En 2022, nombreux sont ceux qui continuent de penser que les images « signalées » pour leur violence par les utilisateurs des réseaux sociaux disparaissent du Web automatiquement, d’un coup de baguette algorithmique. Ainsi, quand je parle à mes étudiants des modérateurs qui s’occupent de nettoyer les espaces numériques, de grands yeux incrédules s’ouvrent généralement dans la salle de cours. Alors comme ça, de « vraies gens » auraient la responsabilité de trier les déchets d’Internet ? Eh bien oui. Et, sans eux, nous passerions une grande partie de notre temps à naviguer avec peine dans une sorte d’immense dépotoir de la psyché humaine. Mais cette méconnaissance s’explique : de fait, l’un des tours de force de l’économie numérique a été d’invisibiliser ses travailleurs et ses infrastructures. Nos données seraient ainsi stockées dans un « nuage », et les mégaoctets d’images violentes postées chaque jour sur la Toile s’évaporeraient dans un soupir de licorne. Or cette dématérialisation empêche de penser correctement les enjeux humains de la révolution numérique, ...

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