L’éternel secret de Bruno Pontecorvo

En 1950, un brillant physicien italien disparaît avec toute sa famille alors qu’il est en vacances à Rome. Cinq ans plus tard, il refait surface en URSS, où il poursuivra ses travaux jusqu’à sa mort, en 1993. Est-il parti de son plein gré ? A-t-il livré des informations sur les programmes nucléaires occidentaux ?


© Keystone/Hulton Archive/Getty

Bruno Pontecorvo avec son épouse Marianne en 1955 à Doubna, en URSS. Son installation en Russie a compromis ses chances de devenir une sommité mondiale de la physique.

«Je veux mourir en grand scientifique, pas en tant que votre foutu espion. » C’est ce que Bruno Pontecorvo a répondu en russe, un an avant sa mort en 1993, à un fonctionnaire russe qui tentait d’organiser un rendez-­vous avec un historien souhaitant l’interviewer. ­Jamais Pontecorvo ne fut aussi près d’accréditer la thèse, largement ­répandue, selon ­laquelle il avait ­espionné pour le compte de l’Union ­soviétique lorsqu’il travaillait sur le projet de ­réacteur ­nucléaire canadien dans les années 1940. « Vash ïebanyi shpion » : cette expression désigne la façon dont Pontecorvo souhaitait ne pas passer à la postérité. Dans Le Mystère Pontecorvo, le physicien des particules Frank Close la traduit par « your fucking spy » (votre foutu espion), ce qui ne rend pas le sens précis du mot ïebanyi (1). Or Pontecorvo connaissait ­certainement le sens précis du mot lorsqu’il l’employa. Il reflète son ressenti face au traitement que lui réservaient aussi bien les Russes que les médias ­occidentaux. Il donne aussi une indication des tourments intérieurs qu’il réussissait si bien à ...
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Le Mystère Pontecorvo de Frank Close, Flammarion, 2016

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