La Madone qui rassemble les Turcs
Publié le 27 mars 2017. Par Amandine Meunier.
Un livre inattendu tient le haut des classements des meilleures ventes en Turquie. « La Madone en manteau de fourrure », publié pour la première fois en 1943, était passé jusque là relativement inaperçu. Son auteur, Sabahattin Ali n’est pourtant pas un inconnu. Intellectuel de gauche, fondateur d’un journal de satire politique, emprisonné plusieurs fois pour ses idées, il est mort de façon brutale et suspecte en 1948. En Turquie, son engagement a jeté une ombre sur son œuvre. Mais depuis trois ans, et alors que les dissidents d’aujourd’hui sont de nouveau dans le viseur du pouvoir, « La Madone en manteau de fourrure » s’est vendue à un million d’exemplaires. Il n’a pourtant rien de particulièrement politique : c’est l’histoire d’une romance impossible entre un jeune Turc et une juive allemande. « Ce livre est lu, aimé et baigné de larmes par des hommes et femmes de tous les âges, mais principalement, par de jeunes adultes. Et personne ne semble capable d’expliquer pourquoi », écrit Maureen Freely dans le Guardian. Pour l’écrivain et critique Kaya Genç, la solution est peut-être à trouver dans le renversement des attitudes de genre que propose le roman. Dans la société traditionnelle et machiste prôné par le président Erdogan, les jeunes chercheraient un peu de liberté.