Philipp Halsmann : le photographe et le parricide

Marilyn Monroe, Richard Nixon, Salvador Dali et Grace Kelly ont posé pour lui. Ou, plutôt, ont sauté pour lui. C’est ainsi que Philipp Halsmann aimait photographier ses sujets : en l’air. Conséquence d’un traumatisme provoqué par la disparition de son père, mort en montagne ?

Marilyn Monroe, Richard Nixon, Salvador Dali et Grace Kelly ont posé pour lui. Ou, plutôt, ont sauté pour lui. C’est ainsi que Philipp Halsmann aimait photographier ses sujets : en l’air. Conséquence d’un traumatisme provoqué par la disparition de son père, mort en montagne ? Ce qui est sûr, c’est que l’accident a bouleversé sa vie. Un jour de 1928, Halsmann et son père, Juif russe dentiste à Riga, partent en excursion dans les Alpes de Zillertal, dans le Tyrol autrichien. Les chemins sont mauvais. Le père – est-il tombé, a-t-il été poussé ? – fait une chute. Philipp cherche des secours mais il est déjà trop tard. Unique témoin, il devient accusé. Trois mois après, à Innsbruck, s’ouvre son procès pour parricide. Halsmann, jugé coupable, est condamné à dix ans de prison. L’historien Martin Pollack s’est replongé dans les archives du tribunal d’Innsbruck pour nous livrer son enquête, entre le roman policier et le livre d’histoire, resituant le procès dans le contexte de l’époque, celui d’une Europe où l’antisémitisme va croissant. « Depuis Vienne, « la rouge », « la bolchévique », comme titrent les journaux tyroliens, une vague de protestation se soulève. L’avocat Franz Pessler, juif lui aussi, reprend l’affaire et exige la réouverture du dossier. Il organise une pétition que signeront entre autres Sigmund Freud, Thomas Mann, Erich Fromm et Albert Einstein demandant, par lettre, au président autrichien de gracier Halsmann », raconte Laura Leonelli dans Il Sole 24 Ore. « Sur les murs de Innsbruck, poursuit-elle, on colla des affiches où l’on pouvait lire : « Citoyens, le procès Halsmann montre à tous ceux qui veulent bien le voir, la monstrueuse influence et la coalition des juifs ». Après deux ans d’incarcération, le futur photographe est finalement gracié et expulsé d’Autriche. Il trouve refuge à Paris, d’où Einstein l’aidera à nouveau à s’enfuir en 1940, vers les Etats-Unis. Il est mort il y a trente ans, sans que l’on en sache plus sur le drame.

LE LIVRE
LE LIVRE

L’assassinat du père. Le cas du photographe Philipp Halsmann de Philipp Halsmann : le photographe et le parricide, Bollati Boringhieri

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