Quand manger du riz complet était un acte politique
Selon Jonathan Kauffman, notre intérêt contemporain pour l’alimentation saine tire ses origines du mouvement hippie et de la contre-culture américaine de la fin des années 1960. Son ouvrage, Hippie Food, « explore le chemin parcouru par des aliments que les Américains regardaient autrefois avec une extrême suspicion, tels que le houmous, le yaourt, le blé complet ou les légumes bio », commente Ben Hoyle dans The Times.
Dans les années 1950, les supermarchés regorgeaient des merveilles alimentaires mises au point pendant la guerre : viande déshydratée, café soluble, jus d’orange en poudre. En réaction à cette abondance de produits industriels, la génération suivante s’est mise en tête de manger différemment. Cette mouvance représentait la convergence de trois désirs : celui d’une alimentation plus saine, plus éthique et plus engagée, notamment en rejetant les méthodes de l’agriculture industrielle.
A l’époque, « manger du riz complet était un acte politique », écrit Kauffman. Les pionniers de l’alimentation saine importèrent du Japon le régime « zen macrobiotique », censé harmoniser l’organisme, ainsi que des saveurs asiatiques telles que la sauce soja ou le tofu. L’alimentation saine se démocratisa à la fin des années 1980, avec l’apparition des premiers supermarchés vendant des aliments bio, supplantant les coopératives hippies. Intégrées au circuit de grande distribution classique, les pousses de soja et les graines germées de luzerne n’étaient plus considérées comme l’apanage des excentriques.
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