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« Restauration de l’église Notre-Dame cathédrale de Paris »


Notre-Dame de Paris par Édouard Baldus

À peine s’est-on remis du choc de l’incendie que la restauration de Notre-Dame est déjà engagée, collecte de dons et concours d’architecture compris. Et les débats vont bon train : faut-il faire entrer la cathédrale dans le XXIe siècle, retrouver ses origines médiévales, s’affranchir de la réfection effectuée par Eugène Viollet-le-Duc au XIXe siècle ?

Les travaux durèrent deux décennies. En 1863, un an avant l’achèvement du chantier, le Journal des débats politiques et littéraires publie dans son édition du 12 mars un article défendant le travail de Viollet-le-Duc, où sont décrits les dégâts subis par l’édifice et les travaux entrepris. Et c’est Adolphe Viollet-le-Duc, peintre et frère cadet de l’architecte qui le signe.

 

 

Avant tout, rendons justice à chacun, et signalons quels furent les précurseurs de l’idée libérale qui a sauvé d’une ruine certaine les plus beaux monuments historiques et religieux du Moyen Âge. On sait que ce fut vers la fin de la Restauration et le commencement du règne du roi Louis-Philippe que se manifestèrent les premiers indices du sentiment conservateur qui devait changer en respect le mépris et l’abandon où étaient tombés ces grands débris. Il ne faut pas en rapporter la cause au sentiment religieux de cette époque agitée par mille passions, mais douée d’une foi peu fervente, ou aux sympathies des archéologues et des savants, attirés alors par d’autres buts. C’est aux poètes et aux artistes qu’il était réservé d’imprimer au goût public un revirement salutaire. MM. Victor Hugo, dans Notre-Dame de Paris ; Michelet, par son histoire de France ; Vitet, dans ses Dialogues historiques ; Mérimée, dans ses Chroniques, ont eu le mérite de commencer cette révolution. Si j’ose ici séparer M. Michelet des érudits, c’est que le succès de la cause qu’il plaidait alors dépend surtout des vives couleurs et du tour pittoresque dont il l’a ornée. Il importait en ce temps de frapper les imaginations et de donner de la popularité à cette idée nouvelle. Nous la voyons en effet des esprits et révéler aux artistes l’existence d’une veine généreuse.

Je sais bien qu’on a abusé du Moyen Âge comme on avait abusé de l’antique, mais qu’importe ? le coup était porté, le fiat lux accompli, et le terrain désormais aplani pour l’étude sérieuse et l’application positive.

Depuis le commencement du seizième siècle, où le style gothique avait été abandonné dans la construction de nos édifices religieux, jusqu’en l’année 1840 environ, nos cathédrales et nos églises avaient été laissées dans le plus triste état de délabrement. Dès Louis XIV, le mot gothique, sous la plume des plus grands écrivains eux-mêmes, devient le synonyme de barbare, et cette expression paraissait si bien rendre le mépris qu’on affichait pour les choses passées de mode, qu’on l’appliquait aux monuments et aux meubles d’une époque plus récente. Je vois encore un de nos grands-parents, frappant du pommeau de sa canne sur le cadre d’un baromètre du temps de Louis XVI, et le condamnant à aller moisir au grenier, sous cette terrible accusation : Gothique !

Imbue de ces idées, que devait faire la génération d’édiles et d’architectes qui se sont succédé du commencement du seizième siècle au milieu du dix-neuvième ? Laisser le temps et ses injures endommager ces édifices, les défigurer ou les mutiler par de maladroites restaurations, appliquer sur leurs flancs d’informes échoppes, y entasser des immondices ; en un mot, compromettre non seulement leur élégance et leur caractère, mais aussi leur solidité. La révolution, chacun le sait, leur porta un rude choc, le gros de l’orage éclata sur les images de l’antique imposture, et sans la déesse Raison dont la statue fut élevée dans le sanctuaire de quelques unes de nos églises, sans l’établissement d’écuries ou de magasins dans l’enceinte de quelques autres, et, il faut le dire aussi, sans le respect traditionnel que les populations avaient conservé pour leurs cathédrales, il est probable qu’il ne resterait plus rien en France de ces beaux édifices.

L’Empire, tout en rétablissant le culte, ne se montra pas favorable à l’art gothique. David, le grand réformateur, n’y était pas plus porté que Lebrun, et nous voyons par la décoration de la cérémonie du sacre à Notre-Dame que les ordonnateurs avaient été plus soucieux, comme leurs prédécesseurs de Reims, de masquer les grands effets de la basilique que de les faire valoir. Dans les dernières années de l’Empire, une tentative timide de résurrection gothique est risquée, mais si pauvre et si troubadour (qu’on me permette cette expression trouvée par les artistes, et qui ne peut être remplacée) qu’il serait presque inutile de la signaler, si elle ne venait expirer juste au moment où la vraie renaissance des arts, du Moyen Âge apparaît à l’horizon. À ce moment (de 1820 à 1840), un mouvement singulier se produit dans les arts, qui peut paraître agir en sens inverse de l’esprit politique, mais qui, en réalité, n’en est que le résultat, puisque les institutions libérales de cette époque permirent à chacun de chercher des voies nouvelles et d’établir la discussion sur des bases plus larges.

Une réaction s’opère, d’abord lente et sourde, mais bientôt plus hardie. On commence par restaurer l’église Saint-Germain-l’Auxerrois, théâtre d’une profanation déplorable, puis, en essayant des réparations dans les chapelles abandonnées de quelques paroisses de Paris et en dégageant leurs abords de leurs constructions parasites, on découvre à nu les plaies qui en dévoraient les murs. De toutes parts le mal est signalé, la presse s’associe aux plaintes de chacun ; la tribune elle-même s’émeut.

À cette date, la partie est gagnée, l’idée conservatrice acceptée par l’opinion, et en 1845, M. Martin (du Nord), ministre de la Justice et des Cultes, peut faire mettre à l’étude un projet de restauration complète de la cathédrale de Paris, et demander aux Chambres un premier crédit de 2 millions 650 000 francs. La loi, solennellement discutée, fut votée la même année. Pour l’exécution des projets, quatre concurrents avaient été mis en présence : MM. Danjoy, Arvœuf, Lassus et Viollet-Le-Duc. Ces deux derniers furent définitivement chargés de la restauration générale.

Nous n’entreprendrons pas de faire ici l’histoire de la cathédrale de Paris. Ce serait recommencer l’intéressant travail de M. de Guilhermy, aidé de M. Viollet-Le-Duc lui-même, et auquel nous renvoyons le lecteur. Qu’on nous permette seulement de donner un aperçu sommaire des différentes modifications que ce monument a subies, soit dans les époques modernes, soit dans les temps plus reculés.

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Dans son Dictionnaire raisonné de l’architecture au Moyen Âge, M. Viollet-Le-Duc nous indique très nettement les causes des transformations qui, peu de temps après sa construction, changèrent l’aspect primitif de l’église. Si l’esprit religieux, qui fut si puissant au douzième siècle, contribua de toutes ses forces à l’édification de nos grandes cathédrales de France, il ne faudrait pas croire que l’influence politique y fut étrangère.

Maurice de Sully, soixante-deuxième successeur de saint Denis (1160-1196), en posant la première pierre de la basilique de Sainte-Marie, détermine une date importante dans l’histoire de nos vicissitudes sociales : celle de la lutte des évêques avec la féodalité du clergé régulier et de la noblesse. Les évêques, prévoyant l’issue du combat livré entre la monarchie et les seigneurs, font cause commune avec celle-là, en opposant l’autel au château et à l’abbaye. Les populations, empressées de se dérober au joug féodal, répondent à leur appel et leur apportent leurs richesses. De là la construction de ces monuments qui deviennent pour le peuple, non seulement le lieu de la prière, mais le refuge, l’asile inviolable de la vie civile. « L’homme y priait, dit M. Michelet, la commune y délibérait, la cloche était la voix de la cité : elle appelait aux travaux des champs, aux affaires civiles, quelquefois aux batailles de la liberté. »

La cathédrale était bien nommée alors de cathedra, siège, tribunal de l’évêque ; juridiction qui parut douce, après les arrêts sommaires des seigneurs. Si l’on explique comment, dans l’espèce de soixante années, de 1180 à 1240, on éleva dans les provinces de France soumises au souverain des édifices aussi imposants, on comprendra, d’un autre côté, qu’une église élevée dans ce but complexe, dut être modifiée quand la monarchie, ayant vaincu, voulut reprendre des droits que les évêques s’étaient arrogés et dont ils avaient même abusé. Aussi quand saint Louis, arrêtant les envahissements de la juridiction ecclésiastique, rétablit cette autorité dans le pouvoir monarchique et civil, nous voyons le zèle des populations se ralentir : sûres de la protection du souverain, elles cessent d’apporter leur argent. À cette date, la fin du treizième siècle, les travaux n’ont plus la même activité, et pas une seule des cathédrales commencées sur une échelle aussi vaste ne put être achevée selon le projet qui l’avait conçue. C’est donc en réalité à partir de ce temps que commencent les mutilations. Il s’agissait alors de rendre au monument sa raison d’être, en le mettant en harmonie avec les institutions nouvelles.

Ce n’est plus le tribunal, c’est l’église.

La première restauration qui vint altérer le style primitif et le caractère simple de la cathédrale de Paris fut entreprise après un incendie (1245) dont les causes et les conséquences ne sont pas indiquées par les historiens, mais qui a laissé pour les constructeurs des traces évidentes. Au lieu de réparer le dommage, on résolut de modifier le plan du monument. L’établissement d’une série de chapelles, qu’on éleva sur les bas-côtés de l’église entre les saillies formées à l’extérieur par les contreforts de la nef, tend à rendre au monument son caractère purement religieux. C’est d’ailleurs un prétexte pour purger le temple d’une foule de trafiquants établis le long de ses parois, à l’intérieur comme à l’extérieur ; c’était en même temps donner satisfaction au goût qui, devenant moins sobre et moins rigide, exigeait des ouvertures et des baies plus larges, plus de lumière et plus d’effet décoratif. Mais on n’obtint ce résultat qu’aux dépens du système, simplement et logiquement conçu, de construction primitive. Ce ne fut pas tout. Par suite de l’élargissement des bas-côtés, les deux pignons nord et sud du transept se trouvèrent débordés, et d’ailleurs l’ornementation de leurs façades n’était plus en harmonie avec la décoration nouvelle. On les reconstruisit (1257), comme on les voit aujourd’hui, avec leurs grandes roses brillantes de vitraux, puis on bâtit les chapelles du chœur, établies, comme celles de la nef, entre les contreforts extérieurs (1296). D’autres travaux du même ordre et de moindre importance nous conduisent jusqu’en 1510.

Ainsi, nous voyons le monument entièrement achevé en 1250, remanié tout d’abord pendant près d’un siècle. Depuis cette époque, c’est-à-dire au commencement du quatorzième siècle, l’édifice ne subit plus de modifications dans l’ensemble de son plan. Il n’est que pillé, gratté, ruiné, ravagé en détail. Jusqu’à la dernière année du dix-septième siècle, la cathédrale ne paraît pas avoir souffert d’altération. Cette date (1699) marque le commencement de l’exécution du vœu de Louis XIII. « La piété, dit M. de Guilhermy, le savant auteur de la Description de Notre-Dame et de l’Itinéraire archéologique de Paris, la piété, qui prétendait rajeunir le sanctuaire par des embellissements modernes obtenus à grands frais, ne lui fut guère moins fatale que la barbarie, qui un peu plus tard s’acharnait à le dévaster. Ainsi, de 1699 à 1755, la cathédrale perdit ses anciennes stalles du quatorzième siècle, son jubé, toute la clôture à jour du rond-point, l’antique maître-autel avec ses colonnes de cuivre et ses châsses, tous les tombeaux du chœur, les vitraux de la nef, du chœur et des chapelles. Les travaux entrepris dans le but de réparer ou de consolider l’édifice le dépouillaient aussi tour à tour de ses moulures, de sa végétation de pierre, de ses gargouilles, de ses clochetons. »

Ce terrible dix-huitième siècle est funeste à la basilique. En 1771, l’architecte Soufflet fait scier le trumeau qui divisait en deux parties la porte occidentale, et fait ainsi disparaître la statue du Christ et son piédestal orné de sculptures. Puis, afin de laisser le passage libre aux processions, il entaille toute la partie inférieure du tympan. Un peu plus tard, toutes les pierres tombales qui couvraient le sol de l’église sont enlevées et remplacées par un dallage en marbre. Enfin la Révolution surprend de nouvelles œuvres de destruction exercées sur les murs de la façade et sur les arcs-boutants du Chœur. La fureur des briseurs d’images en 1792 et 1795 fait disparaître les statues de la galerie des Rois ; elle n’accomplit cependant son œuvre de dévastation que d’une manière incomplète. Un ordre de la Convention (septembre 1792) et un stratagème du citoyen Chaumette, arrêtent cette frénésie. Nous devons à cette intervention, tentée au nom des arts et de la philosophie, d’avoir pu réunir tous les éléments qui ont servi à rendre au monument son véritable caractère.

Le rétablissement du culte, en 1801, n’apporta pas de changements dans l’aspect de la basilique. En 1804 seulement, lors de la cérémonie du sacre, quelques travaux furent ordonnés dans le chœur. Depuis lors jusqu’en 1845, l’église de Maurice de Sully fut laissée dans l’abandon, car les travaux qu’on y entreprit, sous prétexte d’entretien, ne réussirent qu’à mettre en péril la sûreté de l’édifice. La démolition de l’archevêché saccagé en 1851 avait mis à nu le côté faible de l’église, à l’endroit où Soufflot, pour élever ses nouvelles constructions, avait rasé à une profondeur de près d’un mètre les

contreforts de la nef du côté du sud. Ce fut tout d’abord vers ce danger que se portèrent les efforts de MM. Viollet-Le-Duc et Lassus dès qu’ils furent définitivement chargés de la restauration de la basilique. Le système de restauration adopté par eux, et qui se rapprochait le plus qu’il était possible du principe mis en œuvre par les architectes primitifs, les mit en demeure de reconstruire la sacristie, monument accessoire mais corollaire, et dont l’utilité comme auxiliaire matériel devenait aussi urgente que les exigences du culte étaient pressantes. Les dépenses affectées à l’édification de la sacristie s’élèvent à la somme de 950 000 francs.

Rassurés de ce côté, les architectes se tournèrent vers la façade principale, qui était dans le plus déplorable état de dégradation. Les contreforts des tours, les galeries supérieures, les voussures des porches, le beffroi portaient les traces profondes des injures du temps et du marteau démolisseur. Cette partie de la restauration fut poussée avec les soins et les ménagements qu’exigeaient à la fois des travaux d’art et de consolidation. La sculpture statuaire et ornementale fut aussi entreprise à ce moment et continuée peu à peu, selon que les crédits le permirent. Nous la voyons entièrement restituée aujourd’hui dans cette partie du monument. Ici les architectes ont été secondés par les travaux intelligents de MM. Geoffroy-Dechaume, Pascal, Chenillon, Fromanger, Elmerick, Princay, Taluet, Cavelier pour la statuaire, et par MM. Pyanet, Lechesne, Cottebrune, Marchant, Lebègue, Aubin, Lafontaine et Biès pour la sculpture d’ornement.

Le chantier de Notre-Dame ralentit son activité vers 1851, où de nouveaux crédits furent demandés à l’Assemblée Législative, sur de nouveaux devis. Le vote de ces crédits ayant fait défaut aux architectes, par suite des événements politiques qui s’accomplirent à cette époque, les travaux furent interrompus jusqu’en 1855. En cette année les devis furent adoptés et les dépenses approuvées avec allocation d’une somme de 500 000 francs par année. L’ensemble du crédit montait à une somme de près de 6 millions.

Pendant les années 1855 et suivantes, les travaux de consolidation continuent. Les arcs-boutants de la nef, du côté du sud, sont repris, ainsi que ceux du nord. On ne tarde pas à restaurer les côtés extérieurs du chœur, l’abside, puis la face nord du chœur. Ces différents travaux nous mènent jusqu’en 1857, époque où M. Viollet-Le-Duc perdit son ami et savant collègue Lassus, et où il resta seul chargé de terminer la restauration de Notre-Dame. En ce moment se présenta une difficulté. Il s’agissait d’entreprendre les travaux du chœur, tout en respectant les conséquences architecturales du vœu de Louis XIII. D’un autre côté, conserver cette expression religieuse et monarchique, c’était s’interdire toute idée de restauration. Un compromis venu d’une nécessité purement matérielle, concilia toutes les exigences.

Les architectes chargés par Louis XIV d’enrichir les abords du maître-autel avaient résolu de revêtir les parois du chœur de marbres précieux. Rien n’était plus légitime. Mais ce qui l’était moins, c’était de changer en pleins cintres les ogives des galeries. On comprendra sans peine, en effet, que cette transformation ne put s’opérer qu’en entaillant la courbe de l’arc dans sa partie latérale et en diminuant par conséquent l’épaisseur et la solidité des claveaux des cintres. Il en résulta un écrasement et un tassement considérables dans les galeries que supportent ces arceaux et un état menaçant qui nécessita la reprise des piliers du chœur et le rétablissement de son arcature dans ses proportions primitives. Cette reconstruction permit ou plutôt força de rendre à l’ensemble du sanctuaire son caractère propre.

Tout ce qui avait été ajouté, du reste, au dix-septième comme au dix-huitième siècles, fut conservé. Le pavé et la mosaïque de marbre furent restaurés ; les stalles en bois sculpté, les anges de bronze qui portent les instruments de la Passion et le groupe du maitre-autel, par Coustou, replacés. Pour rendre cette restauration plus complète encore, on obtint la restitution des deux statues de Louis XIII et de Louis XIV, qui avaient été portées au Louvre et qui reprirent leur place à droite et à gauche du maître-autel.

Les changements qui furent entrepris dans cette partie de l’édifice se résument par l’établissement autour du chœur d’une grille en fer forgé et doré, par l’abaissement des anciens bahuts qui arrêtaient les regards des fidèles et par le déplacement des chaires de l’épître et de l’évangile, reportées à l’entrée du sanctuaire. La grille qui enceint le chœur porte sur sa face intérieure une inscription qui relate l’histoire de la construction de la cathédrale depuis Maurice de Sully jusqu’à nos jours.

Pendant ce temps, on creusait un caveau qui devait servir de sépulture aux archevêques de Paris, on entreprenait la reprise des voûtes du chœur et de la nef, très compromise par l’action du temps, et on élevait la grande flèche du transept, reconstruite sur l’amorce de celle qui existait encore en 1792, et qui fut détruite peu de temps après. Cette flèche fut terminée en 1858. Elle est en charpente et revêtue de plomb ; elle a coûté 520 000 francs. L’année qui vient de finir a vu achever le ravalement complet de l’intérieur de l’édifice et le rejointoiement de l’appareil de la construction. Aujourd’hui, on remonte le pignon nord du transept, ainsi que les arcs-boutants du chœur, sur cette même face. On termine, en outre, le rétablissement des vitraux supprimés vers le milieu du dix-huitième siècle et la restauration de ceux qui avaient survécu. Les deux roses du transept et celle de la façade principale avaient échappé à l’arrêt qui avait condamné à la destruction toutes les verrières de Notre-Dame (1741). Les artistes verriers qui ont concouru à la restitution des fenêtres du sanctuaire et des chapelles de l’abside sont MM. Maréchal (de Metz), Lusson, Steinhel, Didron, Oudinot, Gérante, Goffetier et Baptiste (de Strasbourg).

Ce qui reste à faire consiste dans l’achèvement du pignon du nord, le mobilier de l’église, l’orgue, le dallage de la nef, et la construction d’un calorifère. Les travaux seront terminés au commencement de l’année 1866. Le total des dépenses s’élèvera à 9 millions 500 000 francs.

Tel est le résumé de ce grand travail. S’il m’est interdit d’insister sur ses mérites, il me sera permis d’invoquer le témoignage des érudits et des artistes qui, hier encore, doutaient de son succès, et qui aujourd’hui en constatent l’heureux accomplissement.

Je puis me dispenser d’appuyer longuement sur l’utilité d’une pareille entreprise. Au point de vue de la science, tout le monde applaudit aujourd’hui à la consécration du principe de la conservation des monuments, idée qui nous permet d’étudier, au moyen de jalons, les grandes époques de l’histoire des arts. Et si nous voulons remonter plus haut, afin de juger la question d’une manière moins étroite, ne pourrions-nous pas entrevoir un enseignement dans les témoins de nos révolutions qui survivraient aux événements au lieu d’y succomber ?

Adolphe Viollet-le-Duc

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