A bas le Néolithique
On a l’habitude de présenter la révolution néolithique, avec l’invention de l’agriculture des villes et de l’Etat, comme un progrès décisif dans l’histoire de l’humanité. Erreur totale, soutient James C. Scott, professeur de sciences politiques à Yale. Il n’est pas le premier à jeter un doute sur le récit habituel, mais il le fait avec la précision d’un chirurgien. Exploitant les découvertes archéologiques récentes, il montre que ce n’est pas l’agriculture qui a donné naissance à la vie sédentaire. En Mésopotamie, celle-ci précède l’économie agraire de quatre mille ans. Pendant tout ce temps les gens vivaient de ressources variées et abondantes dans un climat favorable. Et puis les Staline de l’époque ont eu l’idée de prélever des taxes sur les produits les plus aisément imposables, les céréales. Car seules les céréales, écrit Scott, sont à la fois « visibles, divisibles, évaluables, stockables, transportables et rationnables ». L’invention de l’écriture n’a longtemps servi qu’à ça : enregistrer les récoltes pour les taxer. De là est née aussi la pratique de l’esclavage. Et les hommes de cette époque, mal nourris et stressés, ont perdu en taille et en santé. Le Néolithique, « la pire erreur de l’histoire humaine », dit aussi Jared Diamond.
A lire dans Books: Une histoire hétérodoxe de l’humanité, octobre 2015.