Au fil des ruines du rêve soviétique

Au cours des trente dernières années, Magali Koenig a fait treize voyages dans le monde post-soviétique, de Moscou au Kirghizistan, suivant les traces laissées par des œuvres littéraires. Elle en a rapporté le récit en images d’un monde à l’arrêt, immobile, mosaïque des vestiges de l’URSS. Ici et là, les signes discrets d’une vie qui poursuit son cours, ordinaire.

À la façon de ces pièces de Tchekhov qui débutent au milieu d’une conversation apparemment sans intérêt, Courir après la pluie s’ouvre sans préambule sur un voyage déjà en cours, paisible. Dès la première photographie du livre, on navigue sur des flots à peine ridés par le sillage du bateau. Sous un ciel vaguement nuageux se découpe au loin le mamelon rassurant d’un îlot. Du haut de la tourelle, on peut voir que le navire qui nous fait glisser entre les deux rives d’un large fleuve est du genre marchand. Sur le pont, des draps sèchent ; un rideau jaune s’échappe, nonchalant, de la fenêtre d’une cabine où un lit gît, défait, sous une carte murale. 

Le lecteur découvrira dans les légendes des photos, compilées en fin d’ouvrage, que le bâtiment est un pétrolier naviguant sur la Léna, « d’Oust-Kout à Yakoutsk », en Sibérie, en 2006. Mais il apprendra aussi que, passé un cimetiè...

LE LIVRE
LE LIVRE

Courir après la pluie de Magali Koenig et Blaise Hofmann, Actes Sud, 2022

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