Dickens et ses démons
Publié le 18 juin 2020. Par Pauline Toulet.
Un siècle et demi après sa mort, Charles Dickens continue de fasciner les critiques. À intervalles réguliers paraissent des biographies qui explorent des pans plus ou moins méconnus de la vie du romancier britannique. The Mystery of Charles Dickens, du journaliste et romancier A. N. Wilson, est la dernière en date. « Un aficionado de Dickens n’apprendra pas grand chose de nouveau, même si le livre revisite la vie de l’écrivain avec verve », prévient John Mullan dans le quotidien britannique The Guardian.
Un auteur et sept mystères
The Mystery of Charles Dickens est divisé en sept chapitres, chacun centré sur un « mystère » de la vie de Dickens. Il y a celui de son enfance malheureuse, le jeune Charles ayant été contraint de travailler dans une fabrique de cirage parce que ses parents étaient criblés de dettes. Ou encore celui de sa mort d’une attaque cérébrale, à 58 ans, alors qu’il était vraisemblablement dans les bras de sa maîtresse Ellen Ternan, de vingt-sept ans sa cadette.
À la lecture du livre de Wilson, ce qui ne fait pas mystère en revanche, c’est l’ambivalence de la personnalité de Dickens. L’auteur d’Oliver Twist, que l’on présente souvent comme le défenseur du petit peuple, savait aussi déployer des trésors de cruauté. En témoigne l’enfer conjugal qu’il a fait subir à son épouse Catherine. Lorsque le couple se sépare, Dickens, qui a eu l’élégance de rendre la chose publique au moyen d’une diatribe publiée dans The Times, interdira à neuf de leurs dix enfants de voir leur mère.
L’ambivalence de Dickens
« Le Dickens de Wilson est […] un monstre d’égotisme, de lubricité et d’énergie capitaliste démoniaque », résume James Marriott dans The Times. Si le critique semble souscrire au portrait dressé par Wilson, son confrère John Carey déplore un « traitement grossièrement simplifié de [la personnalité de] Dickens ». « Dans Le Magasin d’antiquités, par exemple, Quilp, le nain monstrueux qui convoite la petite Nell, serait une “une projection démoniaque de Dickens lui-même” », ironise Carey. Pour lui, visiblement, le mystère Dickens reste entier.
À lire aussi dans Books : Le martyre de Madame Dickens, octobre 2011.