Quand la Suisse exportait des Bolchéviques
C’est de Zurich, accompagné par sa femme et son amante, que Lénine a commencé son périple vers la Russie et la révolution qu’il déclenche en 1917. Mais les liens entre la Confédération et la Russie bolchévique ne s’arrêtent pas à sa figure la plus emblématique : Nikolaï Boukharine, l’autre « enfant chéri » de la Révolution, mais aussi Karl Radek, Dada, Annemarie Schwarzenbach, Lydia Dübi et un grand nombre d’autres militants, célèbres ou anonymes, sont passés par la Suisse quand ils n’y sont pas nés. C’est à cette « filière suisse » de la Révolution d’Octobre, que le journaliste Alain Campiotti consacre un ouvrage dense, où la petite histoire côtoie la grande et où des personnages totalement inconnus, comme Reynold Thiel, s’avèrent des « agents d’influence » de Moscou de première ordre. Ainsi c’est ce paisible habitant du village assoupi d’Hauterive qui aurait informé le Kremlin de l’imminence d’une offensive allemande en 1941 (on notera au passage le nombre impressionnants d’agents qui se targuent du même exploit tout en se plaignant de ne pas avoir été entendus). La plupart de ces Suisses tombés sous le charme du communisme auront néanmoins un destin tragique ; beaucoup sont remerciés par une balle dans la nuque ou, fondamentalement suspects aux yeux des nouvelles autorités de l’URSS, seront envoyés dans un camp de travail où ils périront. Que reste-il de leur idéalisme de jeunesse, se demande le quotidien Le Temps de Lausanne ? « Le souvenir mal digéré d’un immense gâchis ».
A lire dans Books : L’âge d’or des « illégaux russe », juillet-août 2017