Qui sont les pauvres ?

Est-on pauvre quand on vit dans 450 mètres carrés, possède un four à micro-ondes, deux téléviseurs, la climatisation et un ordinateur ? L’analyse des statistiques américaines invite à une réflexion en profondeur sur le sens de la notion de pauvreté. Une invitation à relire John Kenneth Galbraith et aussi à repenser les politiques publiques des pays riches, qui méconnaissent la nature de l’indigence véritable.

Les pauvres ont toujours existé et, comme le suggère la Bible, existeront toujours (Deut., 15 :11)(1) Ce n’est qu’à la fin du XIXe siècle que Charles Booth a le premier entrepris de les compter scientifiquement. Depuis son enquête pionnière des années 1880 sur les classes laborieuses de Londres, et jusqu’au milieu du XXe siècle, la misère a désigné un niveau de subsistance permettant à peine de se nourrir, de se loger et de s’habiller. L’estimation initiale de Booth situait le seuil de pauvreté à environ 1 000 shillings par an. À peu près à la même époque, aux États-Unis, Robert Hunter l’évaluait à 460 dollars par an pour une famille moyenne de cinq personnes. On peut ergoter sur les définitions et les calculs qui sous-tendent ces premiers chiffres, mais les conditions de vie des pauvres étaient telles, à cette époque, qu’on reconnaissait l’indigence quand on la rencontrait. Elle était, par exemple, visuellement attestée par les photos des taudis new-yorkais prises par Jacob Riis (2) et par les actualités montrant les soupes populaires et les bidonvilles pendant la crise de 1929. Dans les années 1930, les réformateurs progressistes pressèrent le gouvernement de prendre ...
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L’Ère de l’opulence de John Kenneth Galbraith, Calmann Lévy, 1970

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