Publié dans le magazine Books n° 25, septembre 2011. Par Siegfried Weichlein.
L’anticléricalisme allemand du XIXe siècle fut d’une outrance difficilement imaginable aujourd’hui : arriérés, suppôts d’un Orient obscurantiste et dépravés, les catholiques furent accusés de (presque) tous les maux. Une haine qui répondait à leur propre radicalisme.
Les relations entre l’Église et l’État ont connu, au XIXe siècle, des tensions croissantes. Au sein des deux grandes Églises chrétiennes, comme au sein du judaïsme, le combat fit alors rage entre ceux qui voyaient favorablement les bouleversements nés de la Révolution française, occasion pour eux d’un nouveau départ, et ceux qui y étaient violemment opposés. Dans ce contexte, on observa notamment une spectaculaire radicalisation des catholiques ultramontains, qui se déclarèrent ennemis du modernisme, du libéralisme, de l’indifférentisme et autres « instruments du diable ». Cet extrémisme conduisit en retour leurs adversaires à faire assaut de surenchères… C’est ce processus qu’analyse Manuel Borutta, en étudiant l’anticatholicisme libéral et sa critique du conservatisme rigoriste, en Allemagne et en Italie.
Le premier registre du mouvement est l’orientalisme. Pour les libéraux, le catholicisme n’appartenait pas au monde moderne : il ne correspondait pas au projet de vie bourgeois, mais plongeait ses racines culturelles dans l’Orient, parmi les fellahs égyptiens et dans les colonies aux religions primitives. Dans son « Histoire allemande du XIXe siècle », Heinrich von Treitschke (1) assimilait ainsi le catholicisme ...