Parler avec Pyongyang
Publié le 5 septembre 2017. Par La rédaction de Books.
Pyongyang multiplie les essais nucléaires et balistiques, Séoul organise des exercices militaires, Donald Trump twitte des menaces et le reste du monde tremble en pensant aux conséquences possibles.
Le dialogue avec Kim Jong-un semble impensable. Mais il ne l’est que parce que chaque camp s’enferme dans une vision stéréotypée de l’autre, rappellent les universitaires Geir Helgesen et Hatla Thelle. Dans Dialogue with North Korea ?, publié en 2013, ces spécialistes du royaume ermite précisent que si les dirigeants nord-coréens ne respectent pas les normes internationales, se montrent agressifs et briment leur peuple, ils ne sont ni diaboliques ni fous. En faisant du pays un des membres de « l’axe du Mal », George W. Bush a contribué grandement à cette conception déformée.
La Corée du Nord se trouve, elle, d’autant moins disposée à dialoguer qu’elle est toujours techniquement en guerre, soulignent Helgesen et Thelle. La péninsule vit un cessez-le-feu qui dure, mais pas la paix. Nord et Sud, divisés politiquement et idéologiquement, disposent de toutes les excuses pour s’armer jusqu’aux dents. Les dirigeants nord-coréens sont d’ailleurs convaincus que les Etats-Unis envisagent de supplanter leur régime. Les bases militaires américaines en Corée du Sud et les manœuvres conjointes des deux armées les confortent dans leurs idées paranoïaques.
Face à une telle vision du monde, les menaces et les condamnations internationales de leurs agissements n’ont pas d’effets. Hegelsen et Thelle prônent d’employer la méthode utilisée pour normaliser les relations de l’Occident avec la Chine au siècle dernier : oublier la géostratégie et tendre la main à l’autre pour ouvrir la discussion sur des sujets « faciles ». Ils invitent les Occidentaux à être plus pragmatiques, écarter les droits de l’homme ou le nucléaire des échanges et avancer sur l’approvisionnement alimentaire et énergétique. Les universitaires, même s’ils concèdent que les résultats en Chine notamment sur les droits de l’homme sont mitigés, se disent convaincus qu’une telle méthode aurait pu alléger les souffrances de la population nord-coréenne et ouvrir un cercle vertueux de discussion.
A lire aussi: La Corée du Nord est un régime infantilisant d’extrême droite, Books, avril 2011.