Extrait – Artiste de sa propre vie

Ses après-midi libres répondaient à l’ardente exigence de mettre en œuvre le devoir qu’il s’était fixé. La question du choix de vie fascinait ce dévoreur de biographies.

Le parcours de Kafka dans la vie professionnelle bourgeoise apparaît, de loin, étrangement chaotique et confus. Il est difficile de repérer les moments où il a pris des décisions. Les raisons pour lesquelles il a privilégié durablement certains projets de vie et n’a éprouvé pour d’autres que de brefs enthousiasmes restent plongées dans la pénombre. On a l’impression qu’il a été poussé dans son rôle social, comme la grande majorité de ses contemporains, et comme si les hasards avaient eu plus d’influence sur lui que ses décisions conscientes. Kafka manquait d’idées pratiques tout comme de modèles, et sa volonté de tracer son sillon ne se fait donc sentir qu’à travers ses résistances, ses aversions et une « obstination » qui lui était caractéristique. Kafka savait très exactement ce qu’il ne voulait pas : il n’a jamais ne serait-ce qu’envisagé de devenir avocat, ou d’utiliser son don des langues pour faire fortune. Ses après-midi libres étaient plus importants pour lui que la promesse d’une existence bourgeoise aisée, plus importants même que l’attrait ...
LE LIVRE
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Kafka. Les premières années de Reiner Stach, S.FIscher, 2014

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