L’antisémitisme importé des musulmans
Publié le 3 juin 2016. Par La rédaction de Books.
Juifs et Musulmans, si loin si proches - Karim Miské
Les juifs et les musulmans n’ont aucune raison, si l’on s’en tient à leurs deux traditions, d’être ennemis. Bien au contraire : « En toute logique, ils auraient dû et pourraient être partenaires. Leurs croyances sont très semblables. » Telle est la thèse soutenue par Tarek Fatah, musulman canadien célèbre pour sa critique de l’islam radical, dans The Jew Is Not My Ennemy. Certes, l’antijudaïsme des musulmans est aujourd’hui indéniable, reconnaît-il. Mais il n’est certainement pas dans l’ADN de l’islam, puisque le Coran prône même le respect du judaïsme. Aux yeux de Fatah, la haine contre les juifs a été introduite d’abord dans les textes post-coraniques (notamment les hadith, ces propos prêtés au Prophète par la tradition, qu’il juge apocryphes pour l’essentiel) ; puis, surtout, par les théoriciens islamistes des XIXe et XXe siècles, comme l’Egyptien Sayyed Qotb, fondateur des Frères musulmans, sous l’influence de l’antisémitisme occidental.
Une trajectoire étrange, car pendant des siècles, les chrétiens ont assimilé les deux religions. Les théologiens du Moyen-âge, de même que Hegel plusieurs siècles plus tard, considéraient l’islam comme une autre forme de judaïsme. Les Occidentaux ont même fini par classer les deux populations dans la même « race » sémitique, terme qui avait encore souvent au XIXe siècle une connotation positive : le romantisme et son goût pour la spiritualité orientale était passé par là. Mais le philosémitisme n’est pas resté longtemps sans antonyme. Et c’est en partie en réaction à cet antisémitisme moderne, explique Fatah, que le « retour » des Juifs en Orient s’est imposé avec le mouvement sioniste. Le vieux rêve s’est concrétisé en chassant les Arabes, mettant à mal l’idée d’une parenté judéo-musulmane. Jusqu’à la rupture définitive entre les deux religions lors de la création d’Israël.
En savoir plus : Les musulmans dans les pas des chrétiens, Books, octobre 2015.