Publié dans le magazine Books n° 75, avril 2016.
Enseignant redouté, inlassable militant de la musique contemporaine, Boulez était d’abord et avant tout un propagandiste.
L’homme ne faisait pas dans la dentelle. Alex Ross se souvient dans le
New Yorker de sa consternation à la lecture des écrits de Boulez. Comme ceci : «
Tout musicien qui n’a pas ressenti – nous ne disons pas
compris, mais bien ressenti – la nécessité du langage
dodécaphonique est INUTILE. » Avec le temps, Ross est devenu plus indulgent. « Boulez s’est battu plus qu’aucun autre pour la cause de la musique contemporaine et même ceux qui ont été victimes de son ire ont bénéficié d’une façon ou d’une autre de son énergie. Aucun compositeur des cent dernières années n’a joui d’un tel pouvoir : à Paris, l’Ircam, la Cité de la musique et la nouvelle Philharmonie sont ses monuments. À bien des égards, il ressemblait à Wagner. Il vous obligeait à prendre parti. » Jeff Bieber, dans une lettre au
New Yorker, se souvient d’avoir assisté à un concert de Boulez au New York Philharmonic, dont il vomissait le conservatisme : « Il avait enlevé tous les sièges, rempli la salle de coussins et placé l’orchestre en dehors de la scène. On...