Paris outragé, mais embelli

Sous le second Empire, la transformation de Paris se fait dans la violence et l’affairisme. Le résultat est pourtant une prodigieuse réussite. Comment expliquer ce paradoxe ?


Le boulevard Saint-Germain, l’une des grosses artères dégagées par Haussmann. Ici représenté sur une gravure de 1887, peu après les travaux. © PVDE / Bridgeman Images

La transformation de Paris par le baron Haussmann entre 1853 et 1870 pose un problème de taille : comment pareille réussite a-t-elle pu résulter d’un projet commandé par des motifs si bassement intéressés et mis en œuvre avec une telle brutalité ?

À l’origine de ces gigantesques travaux d’urbanisme, on le sait, il y a d’abord la peur. Celle de Napoléon III devant les lacis de rues étroites de sa capitale, d’autant plus propices aux émeutes qu’elles sont peuplées par les classes les plus agitées. En dégageant de grands axes, comme le boulevard Saint-Michel et le boulevard de Sébastopol, Haussmann entend faire d’une pierre deux coups : d’une part, les artères ainsi créées sont d’une largeur à décourager les barricades (pour plus de sûreté, on remplace même les pavés par du macadam) et facilitent l’acheminement de troupes. D’autre part, cela permet de raser les quartiers dangereux et d’en déplacer les turbulents habitants vers la périphérie.